Le 25 mars 2019
#20# PARAGUAY, au paradis du sucre bio et équitable !
Santa Cruz de la Sierra : après 2 jours de repos et de divertissements, loin des agitations de cette ville lumière située sur le chemin de la cocaïne, il est temps de reprendre la route et pas n’importe laquelle, la fameuse route du Chaco !
La traversée du Chaco en bus : 1400 km en saison des pluies !
18 h : nous avons rendez-vous au terminal de bus de Santa Cruz de la Sierra (en Bolivie) avec la compagnie PYCASU (prononcé Pikachu), un nom qui nous a fait beaucoup rire lors de l’achat du ticket la veille mais on a vite déchanté au moment d’embarquer. Pour ce trajet de 22h, nous avions choisi un bus avec des sièges suffisamment inclinables…enfin c’est ce que nous avait vendu le guichetier…18h30 nous cherchons notre bus, le chef de gare nous indique le fond du parking…surprise 😊 le bus date des années 80 et porte les vestiges du temps comme le lino du couloir central (ou plutôt ce qu’il en reste !) creusé sur près d’un centimètre de profondeur, on voit presque le bitume. On préfère ne pas regarder le tableau de bord (voir photo). Mais le chauffeur et son assistant semblent confiants et portent les traits de l’expérience…alors c’est parti, le moteur gronde, le bolide s’élance…
Mais au fait où va-t-on ? Nous devons rejoindre Asuncion la capitale du Paraguay à 1400 km de là. Le voyage se partage en deux tronçons : 600km jusqu’à la frontière du Paraguay puis 800km côté Paraguay pour traversée le Chaco, un no man’s land de bush hostile.
Le premier tronçon de nuit ne s’est plutôt pas mal passé malgré les sièges inclinables à 10° seulement. 6h du matin, nous descendons au double poste frontière pour les formalités de sortie de Bolivie puis d’entrée au Paraguay dans le guichet d’à côté (c’est pratique 😊). Ça se passe sans encombre après une fouille des sacs plutôt clémente 😉 pour les familles contrairement aux backpackers solitaires qui subissent un interrogatoire en profondeur. Et oui, nous sommes sur la route de la drogue et en particulier de la cocaïne qui passe de la Bolivie au Brésil par des routes peu fréquentées.
C’est à partir de ce moment que le trajet se corse car la route du Paraguay n’est pas dans le même état que celle de la Bolivie…on alterne entre des tronçons tout neufs et d’autres de l’époque coloniale (!?!). On comprend désormais pourquoi les bus -double étages- n’empreintent pas cette voie et on comprendra encore davantage par la suite. On avance doucement mais sûrement. Il est midi, le bus s’arrête brutalement, de grands panneaux indiquent « fin de chantier » « déviation » :-(. La flèche indique une plaine inondée !?! Il pleut dans le Chaco depuis 2 semaines et la route en travaux est désormais entourée d’un lac artificiel sur 7 km !!! Alors le chauffeur du bus hésite de longues minutes…Doit-il s’engager ou pas ? D’autant plus qu’aucun autre véhicule ne nous a rejoint depuis 30 minutes. Finalement au bout de 45 minutes, on voit venir un grand bulldozer qui se fraie un chemin dans le lac…il n’est pas seul, en fait il tracte un gros 4X4 qui surfe derrière ! C’est là que l’on commence à imaginer notre sauvetage !!! Nous avons toutefois des doutes sur la durée car il faut parcourir 7 km dans l’eau boueuse sur un parcours semé d’embuches ! Il faut s’y résoudre, il n’y a pas d’autres solutions 😊.
Notre bus s’attache solidement au bulldozer à l’aide d’un gros câble. Tous les passagers inclus le chauffeur retiennent leur souffle. Allez hop, c’est parti, nous nous engouffrons dans la boue ☹. Le spectacle est insolite, le bus semble suivre les traces laisser par la machine. L’ambiance se détend et tout le monde regarde par les fenêtres….jusqu’à ce que le bulldozer s’arrête net ! Que se passe-t-il ? On ne voit pas bien car le niveau de l’eau dépasse le mètre maintenant. En fait, le bulldozer est prisonnier dans un trou et il vient même de perdre une roue ! Incroyable, on n’y croit pas ! Quel spectacle : les deux véhicules sont immobilisés dans plus d’un mètre d’eau boueuse qui montent dans les escaliers et les soutes du bus…on n’ose pas imaginer l’état de nos sacs à dos à la fin du voyage ☹. Le bus s’enfonce et penche beaucoup maintenant. Esteban commence à prendre peur car on imagine le pire…que le bus se couche sur le côté !!!
30 minutes plus tard, deux autres bulldozers et une grande pelleteuse viennent à notre rescousse. Les machines commencent à aménager une route parallèle avec des canaux de drainage…autant dire que ça a pris un peu de temps !!! Désormais, il faut les gros moyens. Après avoir dégagé le 1er bulldozer qui avait perdu sa roue, c’est maintenant les 2 nouveaux bulldozers qui s’attachent l’un à l’autre puis au bus pour le sortir de l’ornière…impossible ! Il faudra l’aide de la grande pelleteuse qui pousse derrière pour finalement sortir toutes les machines de ce fiasco !!! Nous parcourrons encore plusieurs kilomètres tractés par les deux bulldozers solidaires sans s’arrêter pour rejoindre la route « normale ». Oufff sauvez ! Durée de l’opération de sauvetage : 5h !!!
ici la vidéo du tractage du bus !
Nous atteindrons donc le terminal de bus de Asuncion dans la nuit vers 1h du matin au lieu de 17h ! Nous nous endormons bien éprouvés de cette aventure 😊. Le lendemain, après une courte visite de la capitale, nous partons vers le village de Arroyos y Esteros à 60 km.
Arroyos y Esteros, le paradis du sucre bio ET équitable !
C’est avec beaucoup d’émotions que Stéphane en particulier rentre dans ce village car il y a fait son stage de fin d’étude d’agronome tropicale en 2004, il y a 15 ans. Le village a beaucoup changé : 30 000 habitants au lieu de 5000 à l’époque !
Stéphane y avait accompagné une petite coopérative de 70 producteurs de canne à sucre biologique qui souhaitait obtenir la certification « commerce équitable » pour vendre leur sucre sur des marchés internationaux plus rémunérateurs. Cette coopérative s’appelle Manduvira. Elle existe toujours et se porte très bien. Avec ses 1000 producteurs de canne, Manduvira exporte 15 000 tonnes de sucre bio et équitable dans 27 pays sur les 5 continents ! En 2014, la coopérative réunit même 18 millions dollars pour se construire sa propre sucrerie au village, une première dans l’industrie mondiale du sucre où les producteurs de canne à sucre ne marchent pas sur les plates-bandes des industriels. Un projet osé et un pari réussi 😊.
Luis, le président et Andres, le gérant qui étaient déjà en poste en 2004, étaient très heureux de retrouver Stéphane et l’ont beaucoup remercié pour son appui à l’époque et pour son passage en famille 15 ans plus tard pour constater le succès exemplaire 😊. Manduvira profitera de notre présence pour faire quelques cérémonies d’inaugurations avec les producteurs et leurs enfants.
Lors de la visite de la gigantesque sucrerie qui est la fierté de Manduvira, les enfants ont été impressionnés par les grandes installations notamment la broyeuse à canne à sucre !
Le site s’étend sur 34 ha et Esteban a utilisé le drone pour en visiter une partie notamment l’usine de fabrication de biofertilisants à base de bagasse de canne à sucre et de microorganismes ! Tiens, tiens les revoilà ! Stéphane a beaucoup parlé avec Deiby, le responsable et Ada, l’agronome. La recherche avance et les résultats sont là. Les producteurs obtiennent jusqu’à +30% de rendement en utilisant les biofertilisants plutôt que les produits chimiques ! C’est mieux quand c’est plus sain 😊.
Durant ces quelques jours à Arroyos y Esteros, nous avons rendu visite à plusieurs familles de producteurs de canne à sucre qui cultivent aussi du sésame et des noix de macadamia !
Avant de quitter la ville, nous avons dîné chez Marcial et Lina, le couple chez qui logeait Stéphane pendant son stage en 2004. Deuxième séquence émotions !!!
Ciudad del Este
Après des adieux interminables, nous quittons Arroyos et Esteros pour Ciudad del Este à l’autre bout du pays. 5 heures de bus, un détour par la ville de Caacupé pour admirer sa magnifique basilique et nous voilà dans un autre monde, casi dans un autre pays. Ciudad del Este est une ville très commerciale, un des grands carrefours de l’Amérique du Sud !!! Des grandes tours avec des centaines de centres commerciaux…bien loin de la campagne paisible paraguayenne…
La suite de nos aventures au Brésil dans le prochain épisode,
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La Permaculture Family